Une campagne 2024 éprouvante pour les ruchers français
📢 Brèves | Données issues de l’Observatoire 2025 de la production de miel et de gelée royale (FranceAgriMer, juillet 2025, données 2024).
L’année apicole 2024 illustre une fois encore la fragilité des récoltes face aux aléas climatiques. Le dernier Observatoire conduit par FranceAgriMer par Agrex fait état d’une chute de 28 % de la production nationale de miel par rapport à 2023. Les apiculteurs, qu’ils soient amateurs ou professionnels, ont affronté un printemps froid, pluvieux et venteux qui a lessivé le nectar et freiné l’activité de butinage. Le rendement moyen s’établit à 15,2 kg par ruche, un niveau rarement atteint depuis dix ans.
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Des récoltes contrastées selon les régions
Toutes les régions métropolitaines ont souffert, mais l’ampleur des pertes varie fortement. Dans le Grand Est, la production a reculé de 59 %, la sécheresse et les pluies printanières ayant compromis la floraison des acacias. La Bourgogne-Franche-Comté affiche une tendance similaire avec une récolte divisée par deux. La Bretagne enregistre un rendement moyen de seulement 9,8 kg par ruche, conséquence d’une saison perturbée du début à la fin. En revanche, certaines zones ont résisté : l’Occitanie enregistre une progression de 9 % et la Corse un bond de 26 %, grâce à une meilleure concordance entre floraisons et conditions météorologiques. Ces disparités soulignent la dépendance des ruchers aux microclimats et à la diversité florale disponible.
Miellées : un classement bouleversé
Traditionnellement dominé par le colza, le palmarès des miellées change en 2024. Avec 10,9 % des volumes, le tournesol prend la tête, y compris dans des régions où il n’était pas jusqu’ici majoritaire, comme le Centre-Val de Loire ou la Normandie. La lavande suit de près avec 10,3 %, restant le pilier de la Provence-Alpes-Côte d’Azur, même si les rendements y restent modestes. L’acacia, durement touché par les pluies au nord, ne représente plus que 3,9 % de la production. Les miellées de printemps se sont effondrées à 9,6 % du total national, alors que les toutes fleurs d’été atteignent 25 %. Pour de nombreux apiculteurs, ce déplacement des équilibres oblige à reconsidérer les pratiques de transhumance et la planification des récoltes.
Transhumance et diversification : des réponses inégales
La transhumance demeure une pratique minoritaire : seulement 7,3 % des apiculteurs la mettent en œuvre, mais elle pèse pour un quart de la production nationale. Dans le sud, elle est déterminante, représentant 51 % des volumes en Provence et 40 % en Occitanie. Dans le nord, elle reste marginale. Face aux incertitudes, nombre d’exploitants cherchent des revenus complémentaires. La propolis progresse, atteignant 5,2 tonnes en 2024, soit un gain d’une tonne en un an. Le pollen s’élève à 112 tonnes, principalement récolté par des apiculteurs disposant de plus de 150 ruches. La gelée royale recule à 3,4 tonnes après une décennie de croissance régulière, ses producteurs étant eux aussi affectés par le mauvais printemps. Les produits transformés — pain d’épices, nougats, hydromel — connaissent une diffusion plus large, constituant pour certains une part significative du chiffre d’affaires.
Le bio en retrait
Après avoir atteint près de 4 500 tonnes en 2023, la production de miel biologique tombe à 2 611 tonnes. Le rendement, de 14,6 kg par ruche, est proche de celui du conventionnel. Le bio représente 12,1 % de la production totale, mais cette part est concentrée dans les exploitations de plus de 50 ruches. Cette contraction interroge sur la capacité du segment à absorber les aléas climatiques et sur la nécessité d’outils de valorisation adaptés.
Commercialisation : un équilibre fragile
La crise du vrac de 2023 a laissé des traces. Beaucoup d’apiculteurs se sont tournés vers la vente directe, qui représente 41 % des volumes en 2024, en hausse de quatre points. Les conditionneurs et grossistes reculent à 18 %. Cette réorientation a permis de limiter les pertes, mais elle exerce une pression sur les prix des pots. En vrac, les cours se redressent : 8,5 €/kg pour la lavande, 7,7 €/kg pour les miels de montagne, 7,4 €/kg pour l’acacia. Les miels de grandes cultures comme le colza ou le tournesol restent en revanche sous les 5 €/kg. Les stocks s’élèvent à 13 222 tonnes en fin de campagne, majoritairement détenus par les apiculteurs professionnels, ce qui accentue les écarts économiques entre exploitations.
Entre aléas climatiques et recomposition de la filière
L’Observatoire souligne la résilience partielle de la filière : malgré un recul marqué, certaines régions et certaines productions tirent leur épingle du jeu. Les apiculteurs sont de plus en plus nombreux à miser sur la diversification et à renforcer la vente directe. L’année 2024 confirme néanmoins la vulnérabilité des récoltes face aux épisodes climatiques extrêmes et la nécessité d’anticiper ces variations dans la gestion des ruchers. Pour les professionnels comme pour les amateurs, la campagne passée illustre à quel point la stabilité des revenus dépend de la capacité à adapter ses pratiques de production et de commercialisation.
Référence
Observatoire 2025 de la production de miel, de gelée royale et des autres produits de la ruche (données 2024) - Date de publication : 29/07/2024 - https://www.franceagrimer.fr/sites/default/files/2025-07/SYN-API_Observatoire_Miel_et_GeléeRoyale_2024%20.docx.pdf